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 Chez Rorry W.

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Rorry W.
CLAPSIEN(NE) issu(e) de Snjor
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MessageSujet: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 17 Mar - 16:22

Dans les ruelles en contrebas du Marché bleu, je finis par m'arrêter devant ma maison. Etait-ce une bonne idée d'inviter cet homme chez moi? Je n'en savais rien, sûrement pas; mais mon instinct me poussait à lui faire confiance et à l'aider.
Je franchis donc le pallier, et entre dans ma petite chaumine en laissant la porte en bois ouverte pour laisser mon compagnon entrer.
Ma maison n'est en réalité qu'une seule et unique pièce. Dans le coin droit, un lit caché par un rideau, en face, une table en bois sur laquelle ma théière est restée posée. Un rayon de soleil, filtré par les volets entrebâillés, éclaire la pièce.
Près de l'âtre, mon établi est en bazar, mes dernières inventions encore inachevées sont éparpillées un peu partout dans la pièce.
Je rougis légèrement, honteuse du désordre, me dirige rapidement vers la théière pour la remplir d'eau, puis la place sur le feu, et m'affaire à ranger mes achats, et débarrasser la table.

Je vous prie d'excuser ce désordre, je n'ai plus l'habitude de recevoir, et notre rencontre m'a prise au dépourvu...

Je l'invite à prendre place sur l'une des chaises près de la table, et y dépose deux tasses.
J'ouvre les volets de mon unique fenêtre pour éclairer un peu mieux la pièce, sert le thé, m'assoie en face de lui, et finis par observer son œil avec grand intérêt.

Fascinant...

Ce mot m'échappe dans un murmure, tout en continuant à le sonder du regard je souris. C'est un sourire non contrôlé, de bonheur peut être, comme je n'en avais pas eu depuis si longtemps; Comme envoûtée par cette invention merveilleuse qu'est son œil.

Oh, oui, pardon, le tournevis !

Je me lève d'un bon, et me dirige vers mon établi. J'ouvre un premier tiroir, cherche le bon outil, en sélectionne un, le compare à un autre, les repose tous les deux, pour me concentre sur un troisième. Je continue ma recherche en me parlant à moi même, j'ouvre une petite trousse en tissu, attrape un quatrième outil, puis arrête mon choix sur un cinquième posé sur une étagère.
Je retourne près de lui, et pose l'outil entre nous.

Voici, avec cela vous pourrez réparer correctement votre œil. je vais vous chercher un miroir, vous en aurez peut être besoin.

Tout en réprimant mon désir de le réparer moi même, je lui apporte un petit miroir, et me rassois.
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William Fox
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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 31 Mar - 17:57


Je me tais à l'approche du stand de thé. Toutes ces senteurs sont comme mille couleurs invisibles qui viennent faire sonner mille symphonies silencieuses dans mon esprit. La petite voix était parfaitement muette à ce mot "parfum", et pourtant je suis saisi face à leur puissance. par égard pour mon guide je me retiens de poser mon nez sur chaque case parfumée et je me contente de fermer mon œil pour emplir mon esprit de l'unique sensation de ce panachage parfumé.
Tout est réglé comme le mécanisme de mon œil le sera bientôt. La vendeuse voit mon hôte s'approcher et s'empresse de remplir des petits sachets. Elle sait avec quelles herbes remplir chaque sac. Elle pèse, en rajoute, re-pèse, en enlève... A l'instant même ou sa cliente s'arrête devant le stand, les sachets sont prêts, noués fermement, ornés d'étiquettes à l'écriture manuscrite précisant le contenu des paquets. L'échange des piécettes se fait dans le silence, un sourire ferme, un hochement de tête, et nous repartons. La vendeuse ne m'a pas vu, ou a gardé sa discrétion par respect pour sa cliente.

Elle semble pressée. Je la suis en reprenant mon monologue, sans plus vraiment me concentrer sur ce que je lui raconte. J'essaye de copier sa façon de marcher, efficace et élégante en même temps. A défaut de réussir, cela m'occupe assez pour ne pas voir le chemin passer jusqu'à sa maison. Je me heurte presque à elle quand elle s'arrête soudainement devant une petite porte de bois. Elle laisse la porte ouverte derrière elle et après une hésitation j'entre à mon tour.

Je referme soigneusement la porte derrière moi. Sa maison et passionnante et fourmille de mille objets brillants. Je sens mon œil malade se mettre à gargouiller, mais je parviens à le retenir sans trop comprendre comment je m'y prends. Tout en laissant une main sur mon œil dysfonctionnel pour ne pas qu'il s'agite à nouveau, je laisse l'autre s'attarder sur chaque détail. Tout en étant rudimentaire, je sens le soin apporté à l’ameublement de la petite maison pour la rendre la plus agréable possible. C'est un parfum qui me sors de ma rêverie à nouveau. Le thé. Je me concentre pour ne pas me précipiter vers la tasse qu'elle me sers et m’installe à une allure raisonnable sur le petit fauteuil qu'elle m'a attribué. Je la regarde un instant, puis regarde la tasse et les volutes de fumée qui dansent au dessus. C'est beau. Je regarde mon hôte à nouveau et lui souris. Je ne sais pas si la politesse exige que j'attende plus longtemps avant de goûter, et je laisse encore passer un temps que mon impatience rend douloureux avant d'oser me saisir de la petite tasse. Instinctivement je souffle sur le liquide brun et je regarde, en essayant de dissimuler mon sourire derrière ma tasse, les jolies vaguelettes que mon souffle crée sur le breuvage. Fasciné, je reproduit l’expérience encore plusieurs fois.
Je l'entend murmurer et je me rend compte qu'elle me regarde. Je dois lui sembler idiot avec ma manie de m'émerveiller de tout. Mais à mon grand étonnement, c'est un superbe sourire d'une sincérité touchante qu'elle m'adresse. Je lui rend son sourire et dans cet élan de bienveillance trouve le courage de goûter l'objet de mon désir. Je ferme l’œil et laisse le parfum subtil et doux à la fois glisser sur mon palais. Quel délice ! Quand je rouvre l’œil mon hôte est derrière moi en train de farfouiller dans ses tiroirs, et ma tasse est vide. Je la regarde, et essaye de couvrir le fait que je saisi la théière pour me resservir derrière une question anodine.

Au fait, comment vous appelez-vous ?


Elle revient avec le tournevis et le pose devant moi. Je pose ma tasse avec empressement, vide à nouveau. Je la remercie d'un sourire et me retourne pudiquement en prenant le miroir dans une main et le tournevis dans l'autre. C'est idiot, mais je me sentirai nu de travailler mon œil en ayant mon hôte en face de moi.

Je dévisse chaque lamelle précautionneusement et les poses une à une sur mes genoux en notant mentalement leur ordre. J'enlève le premier bloc de lentilles avec une méticulosité exagérée. Je retient mon souffle en arrivant au diaphragme capricieux. Je ferme l’œil un instant pour le reposer avant l'opération fatidique. J'expire doucement, rouvre mon œil et le braque sur le miroir. Avec soin, j'effleure de la pointe du tournevis la lamelle capricieuse. Je cherche la faille et, la trouvant, donne un petit coup sec.

CLAC !

Je sais que le bruit était presque insensible pour mon hôte, mais il résonne dans mon crane comme un coup de tonnerre. Surtout, je ressent un soulagement, comme lorsqu'une douleur s'en va sans qu'on se soit rendu compte préalablement qu'on avait mal. Un sourire de bien être étire mes lèvres et je m'empresse de remettre les différentes pièces pour pouvoir voir avec mon œil tout neuf.

Avec solennité, le travail fini, je retire ma main de devant l’œil mécanique.

Noir. Blanc. Comme au commencement, mais cette fois rien ne se teinte des couleurs de la vie. Tout ce que voit cet œil est triste et sans teintes. Noir, blanc, gris. C'est tout. L'autre œil proteste et m'envoi toutes les couleurs dont il est capable. La machine réplique à coup de fadeur. Je cligne plusieurs fois de chaque œil. Bzz ! Bzz ! Fait l’œil mécanique. Flosh, flosh... fait l’œil humain. Je me retourne vers mon hôte, paniqué. L’œil gargouille et s'indigne face à ce mouvement brusque. Couleurs et fadeurs se battent dans mon esprit sans parvenir à s'entendre. Bzzzz ! Flosh ! Bzzzz ! Flosh !
Ma tête tourne et je me met à trembler. Je voudrais crier mais un faible filet de voix parvient seulement à franchir mes lèvres.

Aide...

BOOOONG ! Le tournevis que je tenais pourtant fermement l'instant d'avant glisse de la main et s'écrase sur le sol.


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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 31 Mar - 21:03

Oh pardonnez moi, j'ai oublié mes bonnes manières, je me nomme Rorry, et vous êtes ?

Il s'est déjà retourné pour commencer sa réparation. Comment ose-t-il m’ôter cette joie ! pense-je, Ce plaisir d'observer les réparations, d'étudier la fabrication fascinante qu'il porte sur son visage. Je réprime ma frustration aussitôt en me concentrant sur la dégustation de mon thé. Son œil, Sa réparation pas la mienne.
Du coin de l’œil, j’aperçois les lamelles proprement alignées sur sa jambe, et dans le reflet du miroir je le vois concentré et sûr de lui. Arrivé au diaphragme je retiens ma respiration avec lui, de peur qu'il ne soit pas assez délicat pour cette entreprise complexe, mais je m'avoue, à contre cœur, qu'il sait parfaitement y faire.
Cet oeil est un travail d'une précision parfaite, les matériaux sont d'une rareté manifeste et le doigté de mon compagnon égal celui d'un expert.

Un coup sec et Clac un son presque inaudible, peut être même une anticipation de mon esprit dû à des souvenirs anciens.
Je respire à nouveau. Cette tension presque insoutenable que je ressentais vient de s'évaporer. Les journées de sortie au marché sont si angoissantes ! Après avoir croiser la foule, la réfection devient un besoin, une nécessité assouvie uniquement par l'achèvement d'une réparation.
Il n'est pourtant pas fini, il reste des modifications à apporter pour qu'il soit parfait, mais pour aujourd'hui cela suffit à me calmer.

Il se retourne tout à coup paniquer. Après un instant d’incompréhension, je vois son œil mécanique bouger, BZzz, BZzz.  aide... dit il dans un souffle, en faisant tomber mon tournevis.
Je me lève calmement, lui sourit en m'approchant de lui.

Je vais vous aider. Calmez vous, ne bougez plus.

Je lui parle sur un ton assuré et posé, comme lorsqu'on rassure un enfant apeuré.
Je pose une main douce et ferme sur son épaule pour tenter de le calmer et de le fixer sur sa chaise, mon regard plonger dans le sien pour attirer son attention.

Respire. Concentre-toi sur ta respiration. Calme-toi. Inspire. Calme-toi. Expire. Ferme les yeux.  

Tout en joignant le geste à la parole, j'approche doucement ma main devant son oeil mécanique, paume en avant, et la pose délicatement dessus pour boucher sa vision.

Inspire. Concentre-toi sur ma voix et sur ta respiration. Expire.

Je respire avec lui tout en lui donnant mes consignes, pour qu'il copie mon rythme.

Maintenant visualise un arbre. Visualise un arbre immense. Il est si grand qu'il s'impose à ton esprit. Tu n'as plus que cet arbre en tête. Ses racines sont épaisses et solides. Elles sont accrochées à un tronc immense qui lui même amène à des branches, de nombreuses branches, sinueuses, elles se mêlent entre elles, de telle sorte que tu ne pourrais pas dire où elles débutent et où elles s'achèvent. Puis, les feuilles. Les feuilles ont l'air douces, comme si un duvet délicat les maculait. Sous ce duvet tu aperçois les nervures, comme les veines sur ton poignet, elles sont subtiles et gracieuses.

Je continue à lui décrire l'arbre. Je m'attarde sur chaque mot, chaque détails, en lui laissant le temps de visualiser, de se tranquilliser et de respirer.
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William Fox
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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptyMar 3 Avr - 18:55


Une voix s'élève au-dessus de ce flot d'images dissonantes. Mélodieuse et calme. Calme. Sans l'entendre je lui obéis. J'inspire. J'expire. Elle pose sa main sur mon œil malade tandis que ma paupière s'abat sur l'autre.

Noir.

Pas pour longtemps.
Qu'est ce que c'est que tout ça ? Des images dansent derrière mes paupières. Des images sans teinte et sans mouvement. La chaumine de Rorry -puisque tel est son nom- vue depuis mon siège. Le tournevis s'écrasant par terre. La tasse de thé vide sur la table. Et la dernière, Rorry toute proche de moi, sa main en avant pour me secourir. Elle est d'une uniformité grise qui me donne la nausée, mais la bienveillance de son regard transperce la fadeur et l'immobilisme de ces images. Je m'accroche à cette image de toutes mes forces. Je la contemple et m'en impregne.

Photographie. Dit la petite voix.
Je sursaute et rejette l'image. Sans comprendre ni maîtriser quoi que ce soit, j'envoi l'image vers Rorry. Je ne l'ai plus. Elle l'a très certainement, derrière ses paupières à elle. Inquiet de sa réaction, j'ouvre mon œil coloré. Elle me parle. Je ne l'écoutais pas, fasciné par les images, mais de voir ses lèvres s'agiter, toutes proches, je me raccroche à ses mots. Un arbre. Je referme mon œil. Visualiser un arbre. Je m'y applique. Un grand arbre aux grandes branches élancées. Je lui imagine des racines profondes et solides aussi.

Racine. Résonne la petite voix dans ma tête. Elle ne l'entend pas au sens propre de celle des plantes. La petite voix me parle des racines des Hommes. Et des miennes. Je dois réparer l’œil. Je dois lui mettre de la couleur. Et ce sont les racines dont me parle ma voix intérieur qui m'y aideront. C'est pour ça que je suis né.

De connaitre soudain une raison à mon existence fini de m'apaiser définitivement. J'ouvre de nouveau la paupière, et je répond à la question qu'elle m'a posé il y a un petit moment maintenant.

Je n'ai pas de nom. Mais puisqu'il faut en trouver un j'aimerai bien m'appeler William. Rorry, je dois rentrer chez moi. Là où à été inventé le mécanisme de mon œil. Sauriez-vous me guider là-bas s'il vous plait ?


Je la regarde en essayant de traverser le masque de bienséance qui s'abat sur ses yeux. Doucement, je recouvre sa main de la mienne, sur mon œil malade. Si seulement elle pouvait m'aider.


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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptyMar 3 Avr - 20:03

Je sens sa respiration se calmer. Sous la pression de ma main, son épaule se détend un peu. Je souris face à cette situation si familière, et aux souvenirs qu'elle m'évoque.

Puis une image, sans couleur, sans relief, une femme. Me concentrant sur cette intrusion de mon esprit sans comprendre d'où cela peut venir, je chancelle en me voyant. Sur cette image, dans cette chaumine, dans ma robe pour aller au marché... aujourd'hui. Que ce passe-t-il, est-ce... qui est cet homme?
Il ouvre l'oeil, et je m'empresse de cacher mon désarroi sous un masque de bienséance. Je lui souris.

Vous reprendrez du thé?

Sans attendre sa réponse, je me détourne, prend la théière vide et m'applique à la reremplir pour éviter son regard et avoir le temps de calmer la vague de tremblements qui vient me submerger.

William, c'est un joli prénom.

Je connaissais un William, il avait toujours était doux et serviable.

Rorry, je dois rentrer chez moi. Là où a été inventé le mécanisme de mon œil. Sauriez-vous me guider là-bas s'il vous plait ?


Je pose la théière sur le feu, un peu trop brusquement, puis me fixe, dos à lui pour encaisser le choc de sa déclaration.
Là où... inventé... mécanisme... guider, ces mots résonnent dans ma tête et se mêlent. Je ne contrôle plus mon corps, il tremble et les larmes montent. J'arrive à réprimer ces dernières, mais les spasmes sont trop difficiles à gérer.

Je... euh...non...

Retourner là-bas. Jamais. La mort. Les cris. La faim. Si fatiguée. Détruite. Tant de morts. Sacrifices. Peur, tellement peur. Elle...

Y retourner... je... non

Je bafouille, cherche une explication. Mes Oreilles Sifflent. Ou est-ce la théière. Depuis quand est-elle sur le feu? Je l'attrape maladroitement, les yeux embués de larmes que je tente tant bien que mal de ravaler. Je m'approche de la table en chancelant, verse le thé dans la tasse de mon invité, puis dans la mienne. C'est mon seul espoir pour me calmer. Assise, je me concentre sur la dégustation de mon thé, m'énumère tous les arômes que je sens, tout en formant les images mentales de chacune des plantes lorsqu'elles étaient encore en terre.
J'ai mal, tout est trop compliqué à gérer. Je ferme les yeux puis les ré ouvre et essaie de fixer un point précis. Je tremble toujours, ma respiration est saccadée, la crise est toujours là mais elle n'est plus à son apogée.
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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptyMar 3 Avr - 20:52


La perceptive de remplir bientôt ma tasse de thé chaud achève ma vague de panique. J'ai recouvert mon œil de ma propre main et je m’accommode pour l'instant de cette solution rudimentaire. Très vite le fumet parfumé parvient à mes narines et la théière revient avec Rorry. Je voudrais lui sourire et la remercier mais je suis coupée dans mon élan. Ses yeux sont brillants de larmes. Est-ce que c'est de ma faute ?

Non ! Je ne veux pas être responsable de la tristesse de ma bienfaitrice ! Pourquoi est-ce qu'elle pleure ? Qu'est-ce que j'ai dit ? J'ai simplement voulu qu'elle m'emmène là ou mon œil à été fabriqué. Je ne sais pas où c'est. Mais elle visiblement oui. Tant pis, je dois savoir. je m'arme de toute ma douceur et laisse glisser ma main de sur mon œil à sur la sienne, tremblante, sur la poignée de la bouilloire. L’œil m'envoi ces immondes images grises. Bzzzz... Clic ! Je ferme le diaphragme rageusement. C'est une position inconfortable mais je fais un effort le temps qu'elle se calme. Elle ferme ses yeux, les ouvre lentement. Elle doit visualiser l'arbre elle aussi. A quoi ressemblent les racines du sien ? J'hésite à lui demander, puis me reprend. Ce ne serait pas courtois. Tout de même, je m'inquiète et je m'interroge.

Rorry... Je suis désolé. Désolé de vous avoir attristé, et désolé aussi de ne pas comprendre ce qui vous rend si malheureuse... Je voudrais simplement savoir. Je sais si peu de choses, j'ai besoin de votre aide. Vous savez d'où viens ce mécanisme. Pourriez-vous au moins me donner le nom de ce lieu ? Et... Pourquoi vous refusez d'y retourner ? j'imaginais un endroit magnifique, plein de couleurs et d'inventions oniriques. Votre réaction... m’effraie un peu...

Sa main tremble sous la mienne et son regard fuit. J'essaye de plonger mon œil dans les siens et de serrer un tout petit peu sa main dans la mienne. Je n'ai pas renouvelé ma demande de me conduire la-bas. Chaque chose en son temps. Si elle refuse réellement d'y aller, je dois au moins savoir à quoi m'attendre. J'irai seul s'il le faut, même si je dois y laisser ma vie.


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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 18 Avr - 12:28

Le contact de sa main est incommodant. Je n'ai plus eu de réel contact physique avec un autre être depuis... je tremble de plus belle face à ce souvenir. L'arbre, ses racines sont profondes et fortes. Stable et imposant il est rassurant, apaisant. J'inspire profondément une, deux, trois fois. Les fragrances des plantes infusées finissent de me calmer, et j'ose regarder mon hôte dans les yeux (ou plutôt l’œil).
Il y a encore tellement à faire pour qu'il puisse utiliser toutes les possibilités de son œil mécanique.
Il m'a parlé et attend une réponse de ma part. Pourtant, il m'est impossible de me rappeler ses mots. Ils se sont mêlés au sifflement de la théière, au grincement du plancher, à l'écoulement de l'eau chaude dans les tasses.

Je me lève en esquissant un sourire courtois, jusqu'à une petite étagère près de mon lit. Une boîte y est posée, dans laquelle des centaines de morceaux de tissus cherchent leur place. Après avoir sorti plusieurs échantillons, je retourne m’asseoir en face de William. Quelques points de couture et je tend à mon invité mon travail sommaire.

Voici un bandeau rudimentaire qui vous permettra de cacher votre œil lorsque vous en ressentirez le besoin. Le temps de trouver les bons matériaux pour le réparer correctement.

Je sens dans son regard que je n'ai pas répondu à son attente initiale. Il veut y aller... là-bas... Je réprime une nouvelle crise, et lui souris tant bien que mal.

Je ne peux pas y aller.

J'ai réussi à faire une phrase complète. De l'énoncer à haute voix, à une personne autre que mon reflet dans un miroir, m'apaise étrangement.

Je... je comprend votre besoin de comprendre. Je suis peut être celle qui connaît le mieux ce sentiment. Croyez moi, donc, lorsque je vous dis que vous ne voulez pas savoir.

Je ravale mes larmes, une boule dans la gorge, je reprend en le regardant fixement dans les yeux.

Là-bas... vous ne voulez pas savoir.
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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 18 Avr - 14:03


C'est un joli bandeau. les couleurs sobres des différents tissus se heurtent les unes aux autres dans un chaos étrangement beau. Il ressemble à sa créatrice : parfois confus, mais de cette confusion émane une beauté délicate et bienveillante. Je pose le bandeau sur mon œil mécanique, et décrispe le diaphragme. Bzz ! Bzzzz ! Bzzzzzzz... l’œil-objectif capitule et s'endort. Pour cette fois, j'ai gagné. Grâce à ma douce coéquipière. Je la remercie d'un sourire sincère. En plus, je me sens bien plus beau avec mon bandeau coloré qu'avec mon mécanisme vulgairement à nu. Beau... Je n'avais pas encore pensé que les autres puissent me voir beau ou laid. Que peut-être certains voudraient immortaliser mon apparence comme l’œil maléfique a voulu immobiliser Rorry tout à l'heure. Beau ! Beau ! Beau ! La petite voix fond de bonheur à la seule évocation de cette idée. Beau ? Je préfère bon. je vide ma tasse en fermant le deuxième œil. Noir. la petite voix se tait, déçue.

La voix de Rorry résonne, depuis l'exterieur de mon crâne cette fois, et me ramène sur terre. Ses mots tranchent mes espoirs comme des poignards. Elle ne veut pas. Elle ne peut pas. Toute cette souffrance dans son regard, toute cette terreur. Mon monde est-il si odieux que ça ? Pourquoi ? Je ne comprend pas. Je veux comprendre ! Bien sur que si je veux savoir ! Je veux savoir ! Je veux savoir ! Une colère sourde commence à gronder profondément dans mon corps. Je ne connaissais pas encore colère.
Rouge. Ça ne m'aide pas beaucoup. Et puis de quoi je me mêle ? Commence par voir correctement les couleurs, au lieu de cette bouillie toute grise, avant de me parler de teintes ! Colère réveille l’œil endormi. A défaut de pouvoir se projeter en avant, celui-ci se projette en arrière. Paf ! Directement dans le cerveau ! Les images fades dansent de nouveau dans mon esprit comme des mauvais esprits, comme des petits cauchemars me rappelant toute l'amertume de l’œil pas fini. Je n'en veux pas ! Instinctivement, je rejette les images. Une à une, comme toute à l'heure, elles disparaissent de mon esprit pour toujours. La tasse de thé, dehors. La chaumine, envolée. Le sourire de Rorry baigné dans le soleil du marché bleu... J'hésite. C'est ce que j'ai vu de plus joli depuis que j'ai commencé à exister. La colère retombe face à cette image. Souvenir. L’œil ronronne doucement pour manifester son approbation. Bon. Je la garde alors ? D'accord. Je la garde. Mais d'ailleurs les autres, où sont-elles allées ? Je relève les yeux vers Rorry, et comprend que comme tout à l'heure, c'est vers elle que j'ai propulsé les images. Elles les as alors maintenant ? Oui certainement, qui d'autre ? Il n'y a personne d'autre que nous deux dans la maison. Est-ce que j'ai fais une bêtise ? Est-ce qu'elle va m'en vouloir ? Penaud, je reprend la parole tout doucement, comme pour justifier mon erreur.

Rorry... Je dois comprendre...

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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptySam 18 Avr - 21:45

Je reçois tout à coup des images, encore. Je me lève brusquement face à cette nouvelle intrusion. Je ne comprend pas d'où elles proviennent, je n'aime pas ne pas comprendre. Confuse, j'essaie de remettre de l'ordre dans mon esprit.

Rorry... Je dois comprendre...

La théière à nouveau vide, je m'en retourne faire chauffer l'eau; je ferme un instant les yeux, prend une grande respiration puis me rassoie calme et déterminée. Mon sourire à disparu, et l'air grave je fixe à nouveau mon hôte.

Vous souhaitez comprendre, je ne peux vous en blâmer.

Votre mécanisme est d'une beauté rare. Un travail précis et délicat. Je n'avais pas eu la chance d'observer un travail si minutieux depuis mon arrivée à CLAPS. Cette virtuosité technique, ne peut provenir que de Snjor.


Ma voix était calme, posée, malgré les tremblement incontrôlable de mes mains. Les mots s'envolaient sans censure, libres de pouvoir enfin être prononcés à hautes voix.

Snjor est... ou plutôt était, un paradis pour tout être aimant apprendre, comprendre et savoir... Il y a plus de cinq-cent ans de cela. Je suis née dans un monde détruit pas des robots mécaniques incontrôlables, qui n'hésitent pas à tuer les êtres qui se trouvent sur leur passage. Les humains survivants se sont organisés, dans les montagnes ou dans des galeries sous-terraines fortifiées. J'ai appris l'art des mécanismes complexes autant pour me défendre contre les golems que pour survivre face aux humains. Je suis arrivée à Claps il y a quelques années avec une poignée d'autres survivants, car le cœur de gravité de l'île flottante écrasée menace la sécurité de tous. Un dysfonctionnement... le plus complexe de tout les dysfonctionnement que je n'ai jamais vu. Le plus magnifique mais le plus meurtrier de tous.

Si vous souhaitez aller à Snjor, vous ne serez plus le même en revenant. Si vous revenez. Snjor nous pousse dans nos plus sombres instincts. J'en ai fait les frais... les conséquences de mes actes à Snjor me poursuivront le restant de mes jours, et je ne souhaite cela à personne.


La théière siffle depuis un certain temps, il fait presque nuit, je scrute le regard de mon invité, puis me dirige vers la commode au fond de la pièce. Les mains toujours tremblantes, je fais maintenant face à une bougie et dos à William. L'allumette craque. Les larmes sont maintenant incontrôlables. Silencieuses et abondantes, elles roulent le long de mes joues sans que je ne cherche à les essuyer. Je sais qu'elles finiront par s'arrêter, comme mes tremblements. Comme chaque soir.
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MessageSujet: Re: Chez Rorry W.   Chez Rorry W. EmptyLun 20 Avr - 15:32


Elle dit des compliments sur mon œil alors que je ne l'ai toujours perçu que comme un morceau de ferraille défaillant. Et puis...Snjor... Ce nom m'est étrangement familier. Comme une impression de déjà-vu. Je ressens à l'usage de ce mot une excitation insoutenable, un désir sans limite d'aller là-bas, de découvrir et de créer. Et en même temps, c'est étrange, je ne le veux pas. C'est extérieur, ce n'est pas vraiment moi qui ai envie de ce monde-là. L’œil mécanique gazouille joyeusement de voir l'enquête avancer significativement, mais l’œil d'eau et de chair cligne nerveusement à l'évocation de tous ces dangers. J'ai le sentiment de ne pas habiter seul dans ce corps tout neuf. Et ce n'est pas une cohabitation raisonnable et désirée, c'est plutôt la désagréable intrusion d'une personne qui aurait eu une telle soif d’existence qu'elle n'aurait pas réussi à l'étancher en une seule vie. J'ai l'impression qu'on me vole mon tour de vivre en m'incitant à m'engager dans une aventure qui n'est pas tout à fait la mienne.

Et en même temps... Qui suis-je au fond ? Je errais depuis toujours (et toujours veut dire depuis ce matin) quand j'ai eu cette idée, non, ce besoin de retourner sur les traces de mes origines. Je me rend compte maintenant que cette envie là n'était peut-être pas exactement la mienne. Mais qu'importe, je me suis senti si comblé, si heureux d'avoir enfin un but à mon existence, quelque chose à faire, une raison d'exister. Mais est-ce que ça vaut vraiment là peine de risquer sa vie à en chercher l'origine ? Est-ce que je ne ferrais pas mieux de tourner le dos à cet autre intrusif, et cueillir la chance qui m'a été donné d'exister en faisant ce qui me plaira ? J'ai le bandeau maintenant, je pourrais bien vivre borgne pour toujours. Je pourrais même demander à Rorry de m'amputer l'oeil malade pour ne pas qu'il dépasse comme ça. Elle a l'air de le trouver joli, je voudrais bien lui donner. La voix qui a pourtant d'habitude réponse à tout reste muette maintenant. Est-ce qu'elle observe ou réfléchi ? Est-elle endormie ? Morte ? Un frisson me parcours l'échine à cette idée. Elle est peut-être très désagréable à se pavaner avec tout son savoir, mais sans elle je ne suis qu'un nouveau-né dans un corps d'adulte. Sans aucune défense contre ce monde cruel. Heureusement Rorry est là. Elle est tellement pleine de bonté et de patience avec moi, alors que je ne fais que des bêtises. Elle n'a pas bronché face aux vilaines images que je lui ai envoyées, et elle a refait trois fois du thé parce qu'à chaque fois j'ai vidé la bouilloire. Si elle m'abandonnait, la petite voix serait incapable de combler le vide. Elle ne veut pas aller à Snjor avec moi, et moi je ne veut pas aller nul part sans elle. Elle existe depuis si longtemps ! Elle a du apprendre tout un tas de techniques pour se défendre, tandis que moi je sais à peine marcher. Elle parle de Snjor comme si elle s'y était battue à chaque instant pour rester en vie. Et elle a réussi. Elle est si forte. Elle me fait dos maintenant, et elle tremble un peu. J'espère qu'elle n'est pas fâchée contre moi. La voyant comme ça, si fragile et si forte, j'ai soudain très peur qu'elle me congédie. J'ai peur d'être seul à nouveau, mais surtout j'ai peur d'être sans elle. Alors je lui parle, parce que je ne veux pas qu'elle me dise de partir, et que je ne veux plus qu'elle soit fâchée, et surtout je veux qu'elle s'intéresse encore à moi, qu'elle me regarde avec ses grands yeux doux derrière lesquels poussent des grands arbres plein de racines et plein de branches. Je veux encore qu'elle me rassure en en faisant pousser derrières mes yeux à moi, même si ils sont tout cassés.

Rorry ? Je voudrais savoir... Est-ce que vous savez... Ce que je suis ? Vous avez l'air de savoir tellement de choses, et moi je ne connais rien du tout, à part mon œil et ce que j'ai appris depuis que je vous ai rencontrée. Je sais que le thé est bon, qu'il faut balancer ses bras quand on marche et que mon œil est un objectif 50mm à rétrofocus. Je me demande comment c'est possible et à quoi ça rime tout ça ? Pourquoi j'existe maintenant alors qu'hier je n'étais pas là ? Pourquoi je suis né si loin de chez moi, et si longtemps après ? Est-ce que vous savez Rorry ?

J'ai pincé mes lèvres et glissé mes mains entre mes genoux en attendant nerveusement sa réponse. J'espère que je ne vais pas encore plus la fâcher. Le fumet du thé me parvient une nouvelle fois, et mes papilles s'éveillent du désir de plonger une nouvelle fois mes lèvres dans ce breuvage parfumé. En même temps, tout un monde se met en activité sous ma poitrine : au milieu du ventre un grondement un peu inquiétant se fait entendre. Faim, dit la petite voix sortant brutalement de sa léthargie. Je n'ai pas le temps de me réjouir ou me renfrogner face à ce réveil. En dessous du grondement de l'estomac, un autre organe m'envoi des signaux désagréables. Tout autour, tous les muscles se contractent par réflexe, comme pour empêcher que quelque chose de fâcheux n'arrive, et mon talon se met à battre nerveusement le sol, apaisant un petit peu le désagrément. Hm ? Tu as bu trop de thé... murmure la petite voix avec une malice mystérieuse.
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