De la fumée. Cela aurait pu n'être rien, mais...
Elle s’élève doucement à travers la forêt, noire comme du charbon et épaisse comme du goudron, et semble se mouvoir.

La fumée s'approche, lentement, et finit par déboucher sur une clairière, non loin du lieu au-dessus duquel flotte Snjor. Les arbres sont abattus, comme déracinés par cette fumée étrange, et s'abattent sur le sol.
Vous la voyez ?
Elle provient de tanks. De gros réservoirs de pressions, greffés au métal, qui crachent des litres et des litres de fumées toxiques comme de la mélasse qui s'envole lourdement dans les cieux.
Le poids des engins déblayent le chemin, les arbres plient facilement sous leurs chenilles.

Quelques canons, solidement harnachés sont traînés à leurs suites sur des chariots et bientôt c'est toute la clairière qui est emplie d'engins militaires.
De quoi détruire l'île volante.
Les militaires s'affairent à préparer l'arsenal et calculent les trajectoires pour des tirs optimal.

Préparez-vous.

Un de mes collègues observe Snjor, les mains en coupe au-dessus des yeux pour se protéger du soleil.
« Dis, l'île n'était pas censée être bien plus haute ? »
Il me prête ses jumelles pour que je vérifie moi-même. C'est vrai qu'elle flotte un peu piteusement. Nos rapports indiquaient une position vertical d'au moins 700% supérieure.
« Était-ce prévu par les infiltrés sur l'île ? »
Ça, je dois avouer que non... Ils étaient chargés d'approcher l'île du continent, pas de l'abaisser.
Ce doit être un problème externe à nos espions.
J'ai haussé les épaules et je l'ai laissé après lui avoir rendu ses jumelles pour me diriger vers le capitaine.

Il hurle des ordres et des commandements à ses hommes pour qu'ils se positionnent et qu'ils soient prêt à l'assaut.
« Capitaine ? »
L'homme ne daigne même pas me regarder lorsque je lui parle. J'ai été obligé de lui tapoter l'épaule du bout de mon calepin pour enfin attirer son attention.
« C'est pour quoi ? Je suis occupé ! »
Il me crache au visage en répondant. J'ai essuyé les postillons avec ma manche.
« C'est que... L'assaut ne doit pas être lancé maintenant. Nous devons attendre Monsieur Bloomberry. »
Le capitaine a plissé les yeux. Il sait que l'armée répond directement aux bureaucrates, il ne peut pas ignorer mes paroles.
« A quel service appartenez-vous, sold.... Monsieur ? »
J'ai plié les genoux et effectué une petite révérence, non sans me cogner contre mon calepin.
« Je suis fonctionnaire, Capitaine. Je réponds directement au service administratif et à Monsieur le dirigeant suprême Bloomberry. Je suis là pour m'assurer que ses ordres soient respectés. »
Il grogne en relevant la lèvre inférieur. Je connais le mépris de l'armée pour le service administratif et pourtant il sait qu'au moindre faux-pas c'est à mon service qu'il devra rendre des comptes. Et rendre des comptes à l'administration c'est s'assurer de finir mort ou enterré quelque part sans qu'aucun proche n'en soit jamais mit au courant. Disparaître.
« Bien, monsieur le fonctionnaire. Nous attendrons Monsieur Bloomberry avant de lancer les hostilités. »
Gagné.
« Vous ne le regretterez pas. »
Il me repousse de la main, moi et mon calepin.
« Ça, j'en doute. » il gratte la terre du bout du pied « Nous avons l'occasion parfaite et nous la laissons filer. Le temps non utilisé est du temps perdu. »
Il ne se laisse pas faire. C'est le moment de lui rappeler qui est maître de l'autre.
« Capitaine ? » Il relève la tête lorsque je l'apostrophe et abandonne un instant l'étude de ses pieds. « Savez-vous pourquoi l'armée craint tant l'administration et Monsieur Bloomberry ? »
Il fronce les sourcils et grommelle sa réponse :
« Parce que vous possédez nos petits-culs. »
J'ai tapoté sur son épaule, un petit sourire en coin sur le visage.
« Tout à fait. Ne vous avisez jamais d'oublier cela. »

Je suis retourné griffonner sur mon carnet les résultats de mes observations pendant que mon collègue observe les déplacements de l'île avec ses jumelles. Si elle se déplace uniquement avec le vent, cela ne devrait pas être difficile d'ajuster les canons.
J’espère que Bloomberry arrivera vite, que l'on puisse détruire cette île une bonne fois pour toute.